Aria Tammorra

    Un film de Andrea Gagliardi
    Belgique – 2010 – 48' – 16/9

    Production
    Centre Vidéo de Bruxelles

    Coproduction
    Atelier de production du Gsara
    Wallonie Image Production (WIP)

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    SYNOPSIS

    Andrea, à la recherche de ses racines culturelles, nous invite à rencontrer Zi Giannino, Sabatino et Tonino à travers les campagnes napolitaines. Tous les trois, chanteurs virtuoses des communautés paysannes des alentours du Vésuve, incarnent une tradition musicale d’une vitalité inouïe: la Tammurriata.

    « J’ai voulu montrer ce qui m’a touché chez ces personnes et qui m’a rendu fort : leur générosité, leur manière d’être, leur plaisir de partager des émotions, cette fantaisie aussi qui les porte à dédramatiser des situations graves. Leur plaisir d’exister avec les autres, en somme, et qu’ils célèbrent dans les fêtes populaires. » (Andrea Gagliardi).

    Ce film nous offre d’entrer dans un monde de sensations, de vibrations qui font le « sel » de la terre. Il rend hommage à ceux qui réussissent à transmettre un bien précieux : la puissance de la fête.

    Andrea, alla ricerca delle proprie radici culturali popolari, ci invita a seguirlo attraverso le campagne napoletane per incontrare Zi Giannino, Sabatino e Tonino. Cantori virtuosi delle comunità contadine vesuviane, i tre incarnano, e tramandano, una tradizione musicale di vitalità inaudita: la Tammurriata.

    « Ho voluto mostrare quello che mi ha toccato da queste personne e che mi ha reso forte: la loro generosità, il loro modo di essere, il loro piacere di condividere emozioni, questa fantasia anche che le porta a dedramatizare situazioni grave. Il loro piacere di esistere con gli altri in somma, e che celebrano nelle feste popolari. »

    Questo film ci offra di entrare in un mondo di sensazioni, di vibrazioni che fanno il « sale » della terra.
    Rende omaggio a quelli che riescono a trasmettere un bene prezioso: la potenza della festa.

     

     

     CE QU’ON EN DIT

    Un regard sur « Aria Tammorra »

    Les sociologues et les historiens des migrations le savent bien : tôt ou tard, nombre de descendants de migrants et de personnes déplacées ressentent le besoin de comprendre la raison de leur présence ici et maintenant en retournant à la source, à l’origine du grand voyage que firent leurs ancêtres. C’est vrai des descendants d’esclaves africains aux Etats-Unis qui « retournent » en Afrique d’où leurs ancêtres sont venus. C’est vrai de nombreux enfants adoptés en Asie ou ailleurs. C’est vrai ici d’Andrea Gagliardi, fils d’un travailleur immigré de Campanie, lorsqu’il a décidé après une longue période de rupture de renouer avec la terre de son père. Le film d’Andrea Gagliardi met en scène avec sensibilité cette quête identitaire d’un « vieux » de la seconde génération italienne en Wallonie.

    Mais au-delà, ce documentaire est un hommage vibrant non seulement au paysan qu’était son père, mais aussi à toute cette génération oubliée des pionniers de l’immigration italienne d’après-guerre qui ont quitté leur campagne natale pour devenir des ouvriers dans l’industrie Belge. Andrea nous montre que ces femmes et hommes peu ou pas scolarisés dont on appréciait que la force musculaire, provenaient de régions riches de traditions et de cultures, à défaut de ressources matérielles. Les chants et la musique dont parle ce film notamment sont d’une richesse et d’une sensibilité impressionnantes. Les musicologues le savent aussi depuis longtemps.

    Le film est aussi une réflexion sur la rencontre conflictuelle entre modernité et tradition  en ce début de troisième millénaire et sur la culture comme arme de résistance de communautés rurales menacées par l’urbanisation désorganisée et ces fléaux. En effet, ces communautés rurales de l’hinterland napolitain vésuvien filmées par Andrea sont en lutte pour sinon leur survie, du moins pour tenter de transmettre une partie de leur héritage culturel aux générations suivantes. Ces paysans savent qu’ils appartiennent au passé et que les choses se seront jamais plus comme avant.  Pour preuve, un des sujet du film demande à Andrea d’écrire sous son nom, « espèce en voie d’extinction ». Toutefois, ils sont fiers de la richesse de leur culture et de l’importance de la laisser en héritage à leurs enfants et leurs petits-enfants afin qu’ils ne soient pas déracinés sur leur propre terre.

    Cela dit, le film ne verse pas dans la célébration naïve, voire rétrograde des terroirs et des traditions. Il montre en toute simplicité et avec une grande humanité des personnages chaleureux, aimables et doués qui revendiquent leur droit à vivre en harmonie avec leur terre dans une des régions les plus dégradées d’Italie.

    Évidemment, les 48 minutes du film n’autorisent pas à présenter toute la diversité et les contradictions culturelles et sociales de la région. Il illustre bien toutefois qu’au départ d’une réflexion introspective, on peut produire un outil pédagogique de  haute qualité à la fois pour les personnes qui s’intéressent aux migrations, pour celles qui étudient les musiques et les cultures populaires et pour celles qui s’interrogent sur la place de la culture dans la résistance face au rouleau compresseur de la mondialisation.

     

    Marco Martiniello
    03/12/2010
    Directeur de Recherches au FRS-FNRS
    Directeur du CEDEM-ULg

     


     


    PETIT LEXIQUE

    ARIA

    Air que l’on respire ; souffle ; série de sons émis par la voix de l’homme ou par des instruments…l’air étant la cause du son ; mais aussi aire géographique d’une région ; morceau de musique ; attitude corporelle.

    TAMMORRA

    Instrument principal de la  Tammurriata, « chant et danse sur le tambour » comme disent les vieux paysans.
    Tambour traditionnel à corniche, soutenu d’une main et percuté de l’autre.
    De grande dimension (40/50 cm de diamètre), il est différent du tambourin, plus petit, utilisé dans d’autres régions d’Italie.

    TRADITION DE LA TAMMORRA

    La tradition de la Tammorra est celle des communautés rurales aux alentours du Vésuve. Elle est faite de gestes, de postures et de valeurs. Ce n’est pas seulement un genre musical, c’est un certain rapport à la vie, à la nature et au monde qui se transmet au fil du temps. Une culture en somme.